Dialogue de gourdes

Publié le par Folzebuth

Mars, Vénus… vox populi me rabâche depuis quelques années, hommes et femmes ne viendraient pas de la même planète, façon imagée de souligner de façon charmante et céleste les différences de comportements flagrantes entre les 2 sexes. Il ne viendrait à l’idée de personne de remettre en question une telle affirmation tant elle brille de par son évidence dans le quotidien parfois houleux des relations mixtes, qu’elles soient amicales, professionnelles ou plus si affinités.

 

L’objet de cette chronique n’est donc pas de nager à contre-courant dans les flots tumultueux de la psychologie des relations  entre elle et lui, mais plus de souligner d’un exemple récurrent mon incompréhension totale à l’égard de ces filles ou jeunes femmes qui m’entourent. J’insiste en premier lieu sur le caractère régulier marquant la fréquence avec laquelle cette observation fut faite. Le comportement de groupe que je m’apprête à relater ne fut pas observé 1 fois au cours de mon existence, mais bien à 5 ou 6 reprises à intervalles réguliers. C’est d’ailleurs la régularité avec laquelle ces faits survinrent, la dernière en date s’étant déroulée il y a quelques semaines à peine, qui m’amène à rédiger cette chronique colérique et dépitée.

 

Expérience :

Vous choisissez un individu de sexe masculin, d’apparence raisonnablement banale, ni beau comme un Dieu, ni laid comme un pou poisseux. Juste un gars, un de ceux avec qui on bosse, qu’on croise dans la rue sans se retourner, un de ces figurants de plateau télé, ou d’arrière plan flou cinématographique, là pour remplir l’image.

Important pour l’expérience, si le sujet masculin est facile à trouver, de par l’insipidité physique qui le caractérise, il est important qu’il soit seul dans sa catégorie d’homo sapiens à scrotum, 2 tout au plus, afin qu’un ratio sexuel déséquilibré marque le début de notre test.

Vous plongez ensuite notre sujet dans un volume nettement supérieur en nombre d’individus de sexe carrément opposé, et d’approximativement la même tranche d’âge. Selon le degré de puberté/sénilité des cobayes choisis, et la nature des relations qu’ils entretiennent, la boîte de Petri* de cette expérience pourra être soit un restaurant, soit une cour de lycée, soit un amphithéâtre de faculté, soit les 4 mètres carrés de lino revêtant le sol d’une salle de pause-café.

Laissez alors infuser les conversations allant bon train sur l’indice de fiabilité des prévisions météorologiques du WE à venir, les dents longues de l’homme politique dont la cote de satisfaction populaire dégringole, ou encore la médiocre qualité du film passé la veille (faut dire qu’il était commercial, qu’y avait pas de scénar’ et que les requins étaient tout petit !!!).  Faire preuve de patience car sur la gamme de sujets abordés, celui qui nous intéresse peut très bien ne pas faire surface à chaque fois. Un stimulus peut éventuellement précipiter le phénomène mais nous vicierions de facto la crédibilité de nos conclusions.

Avec un peu de chance alors, l’effet escompté se produit. Alors que notre sujet masculin est muet comme un rouget (parce bon, je ne vois pas en quoi la carpe serait plus muette que n’importe quel autre poisson…) et se contente d’absorber auditivement les bavardages plus ou moins intéressants auxquels il assiste, une des actrices de l’échange verbal en cours va alors faussement solliciter le ressenti de ses interlocutrices sur la proportion d’individus de sexe masculin, dans l’environnement immédiat du cercle qui les concerne (amphi, département de l’entreprise, voire entreprise au sens large, classe, asso diverses…), individus répondant au brillant et sophistiqué qualificatif de « pas mal »,  et de l’émoi que ces heureux veinards susciteraient le cas échéant. En gros, elle demande aux autres ce qu’elles pensent des mecs qu’elles côtoient au quotidien.

Ce qui ce produit dès lors est fascinant à observer d’un point de vue strictement sociologique et comportemental ; la réaction est prompte et unanime parmi l’auditoire questionné, et la réponse tombe telle la feuille d’acier sur la nuque bien dégagée du condamné à l’étêtage :

« Des mecs bien…? …j’ai beau chercher, franchement j’en vois pas ! ».

 

Impeccable ! Maintenant que notre expérience a donné ce résultat grandement escompté, il ne nous reste plus qu’à analyser la donnée principale obtenue, qui est je vous le rappelle – des mecs, dans le cercle immédiat, y en a pas un de bien – donnée mise en corrélation avec les éléments de départ, à savoir un ensemble largement non homogène d’individus de sexes différents, sur la base d’une paire de bourses pour six à huit paires de seins. 2 conclusions sautent alors aux yeux :

 

La 1ère souligne un type d’attitude intéressant à observer, où le sujet de sexe féminin fuit farouchement toute forme d’harmonie sur les avis positifs qu’elle pourrait avoir en commun avec ses interlocutrices, déniant de façon absolue qu’un seul individu mâle puisse éventuellement lui seoir. Ainsi fait, ses véritables goûts restent préservés de la critique aigre-douce dont ils eussent pu faire l’objet si sa réponse eût été authentique. Au contraire, n’épanchant point mièvrement ses sentiments affectifs, elle demeure énigmatique dans le cercle, un soupçon rebelle et considérée comme délicate dans ses choix.

 

La 2ème conclusion est que l’individu de sexe masculin pris dans la tourmente d’un sujet de conversation féminin qu’il ne maîtrise plus, devient, de par la minorité qu’il représente à cet instant, totalement translucide et sub-existant.

Il appartient à la reluisante catégorie des « mecs » gentiment évoquée, il le sait, il en est sûr.

Malgré cela, aucun cas n’est fait de l’éventuelle sensibilité ou susceptibilité pouvant être propres à notre sujet pomme d’Adam, puisque de toute façon, il n’est plus là ! C’est donc le verbe léger et la langue agile que les miss vont pulvériser sans s’en rendre compte, le peu d’amour propre dont ce fébrile malheureux dispose.

 

 

Lorsque ce tableau se présenta à moi la dernière fois, il y a quelques semaines disais-je au début de cette chronique, je ne pus m’empêcher de faire part de ma 2ème conclusion aux jeunes femmes attablées en ma compagnie, sur un ton qui je dois l’admettre laissait transparaître un agacement volcanique évident. La plus gentille comprenant alors l’impair, bredouilla, pour rattraper le coup, un : « enfin, on veut dire que…   …sur les mecs dispo, il n’y en a pas un de bien… tu vois ? ».

Me voilà rassuré ! En fait, je suis super canon comme type, simplement je suis en couple, donc hors sujet… malhonnêteté, quand tu nous inspires…

 

Si le côté caricatural et cruel de cette séquence de vie ne te saute toujours pas aux yeux gentil lecteur, je te propose de faire la même expérience en inversant les proportions de départ. 6 ou 8 types qui, en présence d’une amie ou d’une collaboratrice, déclarent tout de go que pas une des femmes qui les entourent ne sont désirables. Je te laisse imaginer l’humeur guillerette de la demoiselle après ces révélations ; et que pensera-t-on des mecs dans ce schéma ? Que ce sont des gros cons de mufles sans tact ni éducation. Et on aura raison.

 

Folzebuth

 

*A celles & ceux qui l’ignorent, la boîte de Petri n’est nullement une discothèque underground branchée techno-italienne, mais une boîte cylindrique peu profonde, en verre ou en plastique munie d'un couvercle, la plupart du temps remplie d'un liquide nutritionnel permettant le développement de micro-organisme en culture étudiés en biologie (merci Wikipedia).

Publié dans Constat dépité

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L
Si je récapitule : tu as été souvent témoin d’une scène où un garçon isolé, confronté à un petit groupe de filles, est catalogué moche ou pas beau.<br /> Si le garçon est, comme tu le décris, effectivement isolé, tu n’as pu en être témoin que s’il s’est agit de toi.<br /> Construire toute une théorie comportementale sur le fait que des filles normalement observatrices et lucides ne t’ont pas, à chaque coup, confondu avec Richard Gere (ou Ronaldinio) suggère un ego sujet à la dilatation. Avec tes racines dans les milieux de l’optique je t’aurais davantage cru capable de disserter sur l’incompétence notoire de certains lunetiers qui font prendre à certaines filles des vessies pour des lanternes et des Guillaumes pour des pas beaux.<br /> <br />  <br /> <br /> Par ailleurs, la supposée spécificité comportementale décrite me semble excessive. Quelle que soit la situation et l’objet de la discussion, et surtout s’il s’agit de thèmes touchant à l’intimité des débatteurs, il est un réflexe courrant qui consiste à se ranger à la position supposée du plus grand nombre, en validant une analyse moyenne et plate avancée par le premier intervenant. Ce réflexe concours à la fédération du groupe et permet à l’intervenant, ou à ceux qui lui répondent, de consolider leur appartenance à ce groupe.<br /> <br />  <br /> <br /> Enfin, la jouissance qu’il y a, dans l’anonymat protégé d’un groupe d’individu, à se moquer bruyamment, ou au moins avec un défaut de discrétion voulu, d’un tiers isolé et à distance d’audition, n’a rien d’exclusivement féminin ni de propre à la scène rapportée.
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F
Très cher La Krapaille,Il y a du vrai dans ce que tu rapportes, mais également du moins vrai, certaines de tes remarques s’appuyant sur mon incapacité à me faire bien comprendre.La question n’est pas de savoir si l’entourage féminin de l’expérience va me confondre avec une quelconque célébrité du show-biz, je suis mieux placé que quiconque pour savoir à quel point mon physique tend vers le commun au-delà du raisonnable. Ma colère, puisque c’est bien de colère dont il s’agit, vient non pas du fait qu’elles soient incapables de me flatter l’ego lorsque ce type de débat stérile arrive (mon ego ayant cette fâcheuse tendance à se porter très bien sans l’aide de personne comme tu le soulignes … :o)…), mais bien de l’inaptitude qu’elles ont à se rappeler que la catégories évoquée des « pas un seul mec de bien », bordel, il y a en un qui écoute !Il ne s’agit point de moquerie vers un tiers isolé à proprement parler, mais de propos blessants tenus à côté d’un tiers devenu translucide.Cette observation fut faite, j’insiste, à de multiples reprises au cours de mon existence, et c’est sans doute pour souligner le côté caricatural de la fréquence avec laquelle j’en fut le triste témoin que je sombre facilement  dans l’excessif pour échafauder ma théorie simpliste.Note bien cependant que, je ne prétends pas que toutes les filles ou femmes ont ce travers, je dis simplement que ce travers est exclusivement féminin ; nuance. Les hommes ont également des travers qui leur sont intrinsèquement propres, tout aussi rédhibitoires voire même beaucoup plus - j’en ferai sans doute un billet avant peu.PS : Il m’a bien fallut 2 lectures de ton texte avant d’arriver à t’identifier (la honte sur moi) mais je me refusais à tomber dans la facilité consistant à lire l’adresse mail dissimulée derrière ton pseudo. A ta disposition pour discuter de tout ceci autour d’un « jaune ».Je t’embrasse.Folzebuth.
S
Très honnêtement, je n'ais pas le souvenir d'une telle expérience au cours de mes dernières années, mais je me dis que la finesse de mes traits doit inviter la gente féminine à ne pas tenir ce genre de discours en ma présence...  :-D<br />  
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F
Mon ego souffre de l'admettre, mais tu dois sans doute avoir raison...